Bien-être avec l'âge
« Observatoire Âge & Société » : le vieillissement vu par les Français
Lecture : 15 minutes

Bien-être avec l'âge
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Dans une société où le regard posé sur l'âge reste souvent empreint de stéréotypes, Expanscience s’est posée la question de la manière dont les Français perçoivent et vivent le vieillissement. Comment ? En lançant l'Observatoire Âge & Société, une étude inédite menée auprès de 2000 personnes représentatives de la population de l'Hexagone. Pourquoi ? Parce que les idées reçues sur l’âge ne sont pas sans conséquences sur celles et ceux qui les subissent. Selon les travaux de la chercheuse Becca Levy (Yale School of Public Health), les personnes ayant une perception positive du vieillissement vivraient en moyenne 7,6 ans de plus que celles nourries par des stéréotypes négatifs.
Nous avons entrepris ce projet pour comprendre et déconstruire les clichés âgistes et ainsi donner à chacun la liberté d’être acteur de son bien-être, et ce à tout moment de sa vie. Une analyse en profondeur, qui révèle des perspectives surprenantes sur notre rapport à l'âge et sur les injonctions sociales qui l'influencent.
Les résultats de l'étude dessinent une chronologie intéressante du vieillissement tel qu’il est perçu par les Français.
Selon les répondants, 33 ans représente « l'âge du bonheur » - ce moment d'équilibre où l'on se sent arrivé à maturité, tout en ayant la vie devant soi. Une période de plein épanouissement qui durerait une quinzaine d'années environ, avant que les premiers signes significatifs de l’avancée en âge ne fassent leur apparition.
En effet, c'est en moyenne à 49 ans que les Français estiment commencer à « prendre de l'âge ». Une vision des choses révélatrice, puisque les répondants considèrent que la société française situe quant à elle ce début à 50 ans. Deux réponses on ne peut plus proches, qui tendent à démontrer que la perception sociale globale du vieillissement impacte le ressenti individuel de chacun.
Le sentiment d’avoir pris de l’âge touche une large part de la population, avec 66 % des Français qui déclarent avoir déjà le sentiment de prendre de l'âge. Selon l'étude, ce sentiment se stabilise à partir de 45 ans, avec environ trois quarts des personnes qui reconnaissent ressentir les effets du temps qui passe.
Mais ce rapport à l’âge n’est pas linéaire. La perception du vieillissement est très subjective, et peut, par exemple, varier selon les générations : 31 % des moins de 25 ans affirment déjà avoir le sentiment d’avoir vieilli, tandis que 22 % des plus de 65 ans disent ne pas encore l’éprouver. Un paradoxe révélateur du fait que la perception de l’âge n’est pas seulement une affaire de chiffres, mais une construction intime, influencée par le vécu, l’environnement et le regard social.
Au global, l’âge moyen donné concernant le début du sentiment de prendre de l’âge se situerait à 48 ans.
L'appréhension face au vieillissement est largement répandue : 60 % des Français confient avoir peur de prendre de l'âge. Cette crainte présente toutefois d'importantes disparités selon le genre et l'âge. Les femmes sont significativement plus nombreuses à exprimer cette peur (66 %) que les hommes (54 %). Une différence de ressenti entre les genres particulièrement marquée entre 35 et 55 ans, période que les femmes semblent traverser avec une angoisse de prendre de l’âge bien plus prononcée que chez les hommes.
83%
Parmi la multitude d’inquiétudes liées au vieillissement exprimées, les changements physiques (rides, cheveux blancs) arrivent en tête pour 83 % des répondants. Suivent les préoccupations liées aux maladies, à la perte de mémoire, à l'isolement et à la perte d'attractivité.
42%
Les aspects socio-économiques ne sont pas en reste, avec des craintes concernant la diminution du pouvoir d'achat et la perte de place dans la société, exprimées par 42 % des personnes interrogées.
La grande majorité des Français (69 %) reconnaît l'existence de normes sociales qui dictent comment se comporter en vieillissant. Plus de la moitié (53 %) affirment avoir déjà subi personnellement ces injonctions, révélant l'omniprésence des pressions sociales liées à l'âge dans notre quotidien.
Selon les répondants, ces normes sont principalement véhiculées par trois canaux d'influence : la télévision (38 %), les réseaux sociaux (32 %) et la publicité (24 %). Ces médias contribuent significativement à forger et à perpétuer les stéréotypes liés à l'âge dans l'imaginaire collectif, en relayant une image idéalisée et irréaliste de ce que l’on est censé être à un âge donné. Une perception déformée de la réalité, qui par contraste peut donner l’impression aux personnes qui font simplement leur âge qu’elles vieillissent avant l’heure.
Les clichés concernant le vieillissement sont à ce point ancrés et banalisés dans notre société que le fait de les verbaliser et de les asséner aux personnes concernées est considéré comme relativement normal. L'étude révèle par exemple que 45 % des Français ont déjà reçu des remarques suggérant qu'une activité ou un comportement n'était « plus de leur âge ».
Ces commentaires touchent davantage les hommes jeunes et les femmes après 45 ans. Une disparité intéressante qui illustre bien le caractère adaptatif de ces injonctions, qui varient selon l'âge et le genre pour maintenir une forme de contrôle social continu.
L’étude révèle toutefois une tendance encourageante : passé 45 ans, de nombreuses personnes expriment un désir croissant de s’affranchir des injonctions sociales liées à l’âge.
74%
des femmes de 45 à 55 ans déclarent ne plus prêter attention à ces pressions
45%
des femmes de 35 à 44 ans
déclarent ne plus prêter attention à ces pressions.
Une volonté marquée de se libérer, qui peine cependant parfois à se traduire dans les faits. Comme énoncé précédemment, plus de la moitié des Français de 45 ans et plus (52 %) reconnaissent avoir déjà renoncé à faire quelque chose parce qu’ils se sentaient « trop âgés » pour cela. Ce contraste souligne une tension forte entre le désir d’autonomie et le poids des normes sociales, qui continuent à façonner en profondeur nos comportements, même lorsque l’on aspire à s’en détacher.
Et si le secret était de laisser son corps et son esprit s’assumer ? Une majorité des Français (66 %) associe désormais le « bien vieillir » à l'acceptation des changements liés à l'âge, plutôt qu'à la lutte contre ces transformations. Cette tendance s'accentue avec l'âge et apparaît plus prononcée chez les hommes, suggérant l'émergence d'une approche plus sereine et réaliste du vieillissement.
Pour les Français, un vieillissement positif et épanouissant est avant tout centré sur la santé, l’acceptation de soi et la préservation de ses dynamiques sociales.
Premier pilier d’une prise d’âge sereine selon les répondants : être en bonne forme physique, conserver son énergie et ses capacités. En seconde priorité vient le maintien et le développement de ses relations personnelles. Les Français désirent vieillir en partageant des moments avec leurs proches et en gardant une vie sociale active. Cultiver un esprit optimiste et s'épanouir mentalement tout en s’acceptant tel que l’on est, avec les changements qu’impose le temps, sont aussi des marqueurs forts du « bien vieillir ».
Enfin, pour beaucoup, il s’agit tout simplement de profiter pleinement de la vie, dans des conditions de vie stables et confortables.
L’étude révèle toutefois que la conception du « bien vieillir » n’est pas figée. Plus les années passent, plus les priorités évoluent. Chez les plus jeunes, « bien vivre son âge » rime souvent avec ambition, activité, projection.
Chez les plus de 60 ans, le lâcher-prise, le confort et la liberté de faire ce que l’on veut, quand on le veut, prennent le relais.
Le vieillissement devient alors synonyme de liberté retrouvée, à condition que la santé et le bien-être soient au rendez-vous.
Les résultats de l'Observatoire Âge & Société mettent en lumière les contradictions de notre rapport à l'âge : d’un côté la peur de vieillir et les pressions sociales, de l’autre le désir de s'affranchir des injonctions et de s’accepter. Ils soulignent l'importance de transformer les perceptions collectives pour permettre à chacun de vivre pleinement chaque étape de sa vie.
En initiant cette réflexion et en menant cette étude, nous espérons avoir contribué à une vision plus positive et libérée du vieillissement, où l'âge devient une opportunité plutôt qu'une contrainte.
Et ce n’est qu’un point de départ. Nous continuerons à explorer, écouter et agir pour que chacun puisse façonner son bien-être, à tous les âges de la vie.
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